La brève juridique
n°15 - 19/07/2018
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Tout comme le code des marchés publics , l'ordonnance du 23 juillet 2015
a repris le principe selon lequel un marché public doit, sauf exception
dûment justifiée, être alloti.
Vos esprits juridiquement affûtés vous permettent sans nul doute
d'en déduire qu'il est possible de discuter tant l'opportunité,
que la consistance de l'allotissement.
Et si cette discussion a souvent lieu à l'occasion d'une conversation plus
ou moins animée, elle peut également être tranchée
par le juge : illustration.
• Absence d'allotissement d'un marché : des justifications techniques
et économiques sont envisageables
• Opportunité et consistance des lots : deux poids, deux contrôles
Absence d'allotissement d'un marché : des justifications techniques et
économiques sont envisageables
Commençons par quelques éléments d'espèce : le marché
concernait la rénovation d'un complexe scolaire rassemblant en un établissement
: une école primaire, un collège, et un lycée.
Bien que cette opération comportait des prestations distinctes, l'acheteur
a décidé de ne pas allotir le marché en se prévalant
de contraintes :
• techniques : en particulier en se fondant sur la nécessité
d'assurer une coordination rigoureuse des prestataires, l'opération se
déroulant sans interruption du fonctionnement de l'établissement.
Raisonnement validé par le juge,qui estime également le fait
que l'entreprise générale est "mieux à même
d'assumer les fortes contraintes de sécurisation des chantiers et des
multiples accès à l'établissement".
• économiques : plus étonnant en effet, le juge valide
le fait que "eu égard à son incidence sur les délais
d'exécution et sur le coût de la location de bâtiments […]
l'allotissement risquait de rendre financièrement plus coûteuse
l'exécution du marché".
Cette prise de position du Conseil, bien que cantonnée aux "circonstances
particulières de l'espèce", peut toutefois laisser quelque
peu circonspect.
En effet, rappelons que l'allotissement de principe procède notamment
d'une volonté de favoriser l'insertion des PME dans les marchés
publics, particulièrement dans le domaine des travaux.
C'est d'ailleurs cette volonté qui a guidé l'abandon par la loi
SAPIN de "l'offre variable" initialement prévue dans les textes
.
Il est donc fort étonnant de valider un motif de ce type, nonobstant
la volonté, fort louable, de rationnaliser l'utilisation des deniers
publics.
CE,
25 mai 2018, Société l'Atelier des compagnons, n° 417869
Opportunité et consistance des lots : deux poids, deux contrôles
L'office du juge ne s'arrête pas lorsque commence l'allotissement.
C'est ce qu'a récemment rappelé le Conseil d'Etat au travers
d'un arrêt qui concernait la décomposition de prestations en 9
lots, en lieu et place des 97 constitués lors de la précédente
consultation.
Le juge rappelle la différence qui peut intervenir dans l'intensité
de son contrôle :
• S'agissant de la décision de ne pas allotir un marché
: le juge opère un contrôle des motifs, c’est-à-dire
un contrôle assez poussé des justifications apportées par
l'acheteur à l'occasion de sa décision de ne pas allotir un marché.
Le contrôle est strict à ce stade, car l'obligation découle
directement de dispositions réglementaires.
• S'agissant de la définition du nombre et de la consistance des
lots : le juge opère cette fois-ci un contrôle restreint, qui se
limite à l'erreur manifeste d'appréciation .
Le contrôle est plus souple à ce stade dès lors que l'acheteur
dispose d'une liberté de choix en la matière.
En l'espèce, l'acheteur se prévalait d'une réduction drastique
du nombre de lots, en raison des difficultés d'exécution qu'il
avait rencontré dans le cadre du précédent marché.
Cette justification prise, le Conseil censure l'arrêt d'appel qui se prononçait
sur l'absence de motifs techniques ou économiques de nature à
justifier l'absence d'allotissement par corps d'état.
CE,
25 mai 2018, Hauts-de-Seine Habitat, n° 417428
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